La bague de Jeanne d’Arc au Puy du Fou : vrai ou faux anneau ?
C’est le vendredi 4 mars 2016 que le parc du Puy du Fou fait l’acquisition d’une bague attribuée à Jeanne d’Arc lors d’une vente aux enchères organisée par la société britannique TimeLine Auctions. Arraché aux Anglais après plusieurs siècles sur le territoire britannique, l’anneau de Jeanne d’Arc est présenté en signe de victoire devant une foule de 5000 personnes réunies devant le château du Puy du Fou. Rapidement, les historiens spécialistes de la Pucelle de Lorraine émettent des doutes sur son authenticité. Aujourd’hui encore, la situation reste floue et l’anneau est loin de faire l’unanimité auprès des spécialistes. L’anneau de Jeanne d’Arc est-il une relique historique ou un faux ?
Jeanne d’Arc : deux anneaux, deux histoires
Lorsque le Puy du Fou acquiert cette bague attribuée à Jeanne d’Arc pour un prix de 376 883 euros, l’anneau est présenté par TimeLine Auctions comme un anneau « d’argent doré » du XVe siècle. Son inscription « I M » ferait alors référence à « Jesus Maria ».
Le fondateur du parc vendéen, Philippe de Villiers, affirme alors que « C’est la dernière relique de Jeanne d’Arc. On a tous les certificats fournis par les commissaires-priseurs [de Londres] ». L’expertise date en effet l’anneau du XVe siècle. Peu d’historiens, cependant, se rangent à cet avis, si ce n’est Jacques Trémolet de Villers, auteur du Procès de Jeanne d’Arc.
Le comité scientifique de l’Historial Jeanne d’Arc à Rouen, composé d’universitaires, fait le choix de ne pas se positionner clairement, car dans l’incapacité de certifier l’authenticité de l’anneau. Mais l’historien Olivier Bouzy responsable du Centre Jeanne-d’Arc à Orléans, met le doigt sur un élément très intéressant rapporté à l’époque au journal La Croix :
« Au cours de son procès, Jeanne d’Arc évoque deux anneaux qui lui ont appartenu. L’un est aux mains des Bourguignons, il est « en laiton doré » et porte l’inscription « Jesus Maria » ».
Cet anneau, cadeau de ses parents, est le seul à être décrit précisément. Il correspond en plusieurs points à celui acquis par le Puy du Fou. Pourtant, la vente aux enchères fait état d’une bague en « argent doré », et non en laiton doré.
Nous n’avons aucune indication sur l’autre anneau de Jeanne d’Arc, détenu par l’évêque Cauchon : la Pucelle le réclame avec insistance, sans pour autant faire directement référence à ses caractéristiques physiques. C’est pourtant cet anneau que la société TimeLine prétend vendre lors de sa vente aux enchères, faisant ainsi une première confusion. Après une nouvelle expertise, Nicolas de Villiers change alors sa version pour associer la bague à l’autre anneau resté aux mains des Bourguignons, en faisant la supposition que ces derniers auraient vendu Jeanne d’Arc ainsi que sa bague aux Anglais.
L’historien Olivier Bouzy souligne alors que rien ne prouve le fait que les Bourguignons aient vendu cet anneau aux Anglais, ce qui aurait d’ailleurs été surprenant étant donné leur désir d’effacer définitivement toute trace d’elle. Il s’étonne également qu’« aucun document ne mentionne une telle relique avant 1909 ». Mais l’hypothèse d’une telle cession est aussi bancale car à l’heure du procès de Jeanne d’Arc, la bague est encore aux mains des Bourguignons, et non des Anglais.
Mais même en admettant que celle-ci ne leur ait été remise que dans un second temps, les pièces du dossier ne permettent pas aux historiens d’établir avec certitude son suivi de transmission : tous les propriétaires de la bague restent des propriétaires « présumés ».
Une vraie bague, mais à qui ?
Les différentes expertises historiques valident la concordance entre les caractéristiques de la bague et les descriptions de l’objet durant le procès de Jeanne d’Arc. Son inscription « M », en revanche, s’avère postérieure au XVe siècle. S’il semblerait que l’on puisse valider l’ancienneté de cet objet religieux et le considérer comme une relique historique, il semble impossible de le rattacher avec certitude au personnage de la Pucelle pour les historiens spécialistes (Colette Beaune, Philippe Contamine, Olivier Bouzy, ou encore Sandra Louise Hindman).